Simple hébergeur ou vrai média : YouTube est-il devenu la télé ?L'opacité de la modération de YouTube nourrit toutes les hypothèses... quant à son durcissement, il dessine aujourd'hui les contours d'une ligne éditoriale qui rapproche la plateforme d'un média traditionnel, selon nombre de vidéastes qui réclament plus de transparence. Problème : YouTube n'a aucune intention d'assumer les mêmes responsabilités qu'un média. Second volet de notre enquête.Dans la première partie de cette enquête, nous avons montré que les deux éléments les plus saillants de la politique de modération de YouTube vis-à-vis des vidéastes de la plateforme sont aujourd'hui la rétrogradation, voire la suppression, des onglets de suggestions et de recherche (dit "shadowban") ; ainsi que l'interdiction d'une vidéo aux moins de 18 ans – qui nécessite de transmettre sa carte d'identité ou sa carte bancaire à YouTube pour pouvoir regarder une vidéo. À la liberté éditoriale presque totale des débuts du site s'est désormais substitué un contrôle très étroit des contenus, appliquée avec plus ou moins de sévérité selon la chaîne. La liste d'interdits destinée à plaire aux plus gros annonceurs, interminable et dépassant de très loin le seul cadre légal, s'apparente pour bien des youtubeurs à une véritable ligne éditoriale dessinée en creux.À tel point que leur organisation professionnelle, la récente Guilde des vidéastes, compte bien produire un rapport permettant de démontrer l'existence de ces distorsions, en particulier concernant le "shadowban", et ce sans contestation possible par la filiale de Google, afin d'obtenir à minima un peu plus de transparence. Mais la transparence est-elle vraiment possible ? Car elle pourrait bien faire sortir YouTube du statut juridique privilégié de simple hébergeur pour lequel se battent toutes les plateformes, pour entrer de plain-pied dans celui d'éditeur, comme n'importe quel média. Enquête auprès de ceux qui semblent constituer aujourd'hui la seule variable d'ajustement d'une plateforme en équilibre entre revenus publicitaires et statut légal avantageux.Stars sous protection et P-scoreSi la modération se durcit, certaines chaînes de la plateforme semblent étrangement épargnées... car en réalité, fait remarquer à Arrêt sur images Bruce Benamran, de la chaîne e-penser qui compte près de 1,2 million d'abonnés, "dans les conditions générales d'utilisation, il y a toujours une clause pour dire que même si on respecte toutes leurs règles, ils peuvent toujours décider que ça ne leur convient pas". Il ajoute qu'un strict respect des règles des conditions d'utilisation de YouTube, appliqué de la même manière qu'aux vidéos du Joueur du Grenier (voir notre premier épisode, ndlr), devrait engendrer une limite d'âge et des rétrogradations des suggestions pour d'innombrables autres vidéos, telles que les clips musicaux qui semblent ainsi bénéficier d'un passe-droit. Une souplesse manifeste pour certains donc, et à l'inverse un examen particulièrement attentif pour d'autres, nous signalent plusieurs youtubeurs. Ce qui se manifeste, par exemple, lorsqu'une vidéo du Radis Irradié est interdite aux mineurs à cause de citations de vidéos publicitaires (à tendance pédopornographiques) pourtant elles-mêmes validées par le service pub de YouTube. Ou que d'autres nous font remarquer qu'ils ont écopé d'une interdiction aux mineurs pour des citations de vidéos YouTube auxquelles n'est pourtant pas appliquée une telle limite d'âge.Ce qui a semblé être confirmé lorsqu'en octobre 2019, un youtubeur états-unien découvre que YouTube produit une note individualisée pour chaque youtubeur, nommée "P-Score", alors visible dans le code informatique des pages web du site (puis rapidement rendu invisible). Plus le "P-Score" est élevé, plus la chaîne et ses vidéos semblent pouvoir être recommandées par l'algorithme. À ce "P-Score" s'ajoute un autre label, le "throttling", dont la présence indique qu'une vidéo représente un risque pour les annonceurs. "Pour beaucoup, [le P-Score] prouve que YouTube favorise des entreprises, personnalités du monde du spectacle et médias plutôt que les créateurs de contenus qui ont fait sa renommée", rapportait alors Numerama. "Ce n'est pas forcément parce qu'une vidéo est démonétisée qu'elle ne sera plus mise en avant, c'est juste que selon les critères de YouTube, son contenu est moins adapté aux annonceurs, votre P-Score dégringole, vos revenus aussi, et vous êtes moins mis en avant", résumait aussi le youtubeur Sylvqin (reçu sur notre plateau pour évoquer l'enquête sur YouTube), dévoilant au passage les "P-score" de vidéastes français.Le contrôle exercé par YouTube sur les vidéos susceptibles de rencontrer du succès se renforce aussi de manière continuelle et très prononcée depuis deux ans. Le fondateur de la chaîne Mastu, plus de trois millions d'abonnés, faisait ainsi déjà part de son incompréhension en août 2019, face au logo de dollar jaune signifiant pour lui moins de revenus et une rétrogradation dans les suggestions. Mais en réalité, la plupart des youtubeurs joints par ASI estiment que tout a commencé suite aux deux "adpocalypses". En 2017, puis en 2018, de célèbres vidéastes mettent en ligne des vidéos plus que choquantes, telle la découverte d'un homme venant de se suicider au Japon. Les plus grandes marques de la planète se retirent, YouTube leur promet alors des actions de grande envergure pour qu'elles reviennent. Aujourd'hui, ce contrôle croissant se manifeste jusqu'au formulaire digne des administrations les plus tatillonnes que doivent remplir les vidéastes lorsqu'ils mettent en ligne leurs vidéos. Formulaire que nous nous sommes procuré : bien qu'il laisse encore à ce stade plus de liberté que les chaînes de télévision, selon un youtubeur connaissant ces deux espaces médiatiques, l'espace semble se rétrécir progressivement.En effet, YouTube veut désormais savoir quel est le niveau de vulgarité du langage utilisé, "un peu", "plutôt" ou "extrêmement". Ou si la vidéo est une "histoire d'amour", un "cours d'éducation sexuelle", comporte des "discussions traitant d'expériences sexuelles intimes" ou contient des "propos évoquant le fétichisme". Si l'on y verra des "interventions violentes des forces de l'ordre présentées" à des fins pédagogiques ou non, ou bien de la "violence domestique". Mais aussi si la vidéo comporte des propos "critiquant les opinions ou actions d'un individu de manière non blessante" ou une "incitation à la haine" – comme si un vidéaste allait cocher cette dernière case de son plein gré. Il y a des dizaines d'items d'une grande précision, parfois en rapport avec la loi française, mais se référant la plupart du temps aux règles internes à la plateforme. Car YouTube veut aussi savoir si, dans telle ou telle vidéo, "sont mentionnés brièvement des sujets controversés d'une manière ni explicite, ni descriptive", ou "des sujets controversés non choquants visuellement". Ou bien encore "des descriptions illustrées ou détaillées de sujets controversés". Des "sujets controversés" pouvant inclure un "visuel de rasoir" ou des "faits historiques ou d'intérêt public liés à l'avortement". Car "cette consigne s'applique même aux contenus visant à commenter un événement, ou ne comportant aucune image choquante", prend soin de préciser YouTube.YouTube a-t-il une ligne éditoriale ?Alors, à quel moment la modération de plus en plus forte des vidéos mises en ligne sur YouTube, dont le "shadowban" n'est qu'une des manifestations implicites, dessine en réalité les contours d'une ligne éditoriale ? Vu des youtubeurs, une certitude : cette ligne éditoriale existe bel et bien. Et cette ligne s'apparenterait à celle d'une chaîne comme TF1 ajoutée d'une bonne dose de pudibonderie culturelle états-unienne, conçue autant pour séduire les plus grandes marques que pour éviter que la désinformation (qui y pullule pourtant) n'invite les États à se pencher sur la plateforme. "Ça m'est arrivé d'avoir trois jours de montage, de remontage, de virer les taches de sang, un mot, en espérant que ça passe", témoigne le fondateur de la chaîne Sheshounet, Alexandre Fraweel, 781 000 abonnés. Youtubeur jeux vidéos, il subit de plein fouet les limites culturelles américaines (comme la chaîne Joueur du Grenier). "On floute pas mal, par exemple, si j'ai une femme en maillot de bain dans la vidéo, on fait attention."Chez Louis-San, la série des "histoires d'horreur", souvent basées sur des faits divers japonais, lui a causé tellement de problèmes qu'il l'a interrompue. "Le fait est qu'aujourd'hui, comme les limites sont totalement floues, la seule solution pour moi est de sur-censurer", explique son fondateur. Pour un youtubeur historique tel que Benjamin Brillaud, de la chaîne Nota Bene, 1,8 million d'abonnés, YouTube impose désormais d'éviter toute représentation de cadavre, même en arrière-plan, au risque d'en subir la modération. Compliqué pour évoquer les conflits... ou la pénurie de corps pour les étudiants en médecine anglais du XIXe siècle, vidéo à paraître de 33 minutes pour laquelle YouTube a cette fois-ci indiqué explicitement au vidéaste que la plateforme ne voulait pas de "nudité" s'il ne voulait pas écoper d'une limite d'âge, sans autre précision. "On est dans un flou total, on ne sait jamais vraiment ce qui est reproché", note-t-il auprès d'ASI. "Sauf pour la musique", poursuit-il. Car en ce qui concerne les droits d'auteurs musicaux, YouTube est d'une redoutable efficacité, signalant à la seconde près les passages pour lesquels des ayants-droits estiment avoir été volés.Quelque peu perdus, en particulier quand ils abordent l'un des innombrables sujets désormais jugés "sensibles" ou "controversés", soumis à des décisions perçues comme de plus en plus politiques et discrétionnaires à mesure que leur travail se rapproche du journalisme, les vidéastes expliquent presque tous comprendre l'impératif financier de ce qui reste une très grande entreprise privée. Mais demandent tout aussi uniformément que les règles et leur application deviennent précises et explicites, afin qu'ils sachent à quoi s'en tenir. "Un peu de clarté avec ceux qui font le succès de la plateforme est le minimum que les youtubeurs demandent", résume à ASI Julien Diaz, fondateur de la chaîne Le SadPanda, 95 000 abonnés, mais qui participe aussi à la chaîne Joueur du Grenier. Y compris quand le processus est automatique. "De toute façon, c'est bien programmé par quelqu'un ! Il y a forcément des volontés humaines derrière les algorithmes, ce sont les annonceurs à qui il faut faire plaisir, et ils vont dicter les règles éditoriales", fait remarquer la fondatrice de la chaîne d'essais de produits liés à la sexualité Clemity Jane, Clémence Chung Gofman, dont les vidéos sont loin de toucher systématiquement ses 166 000 abonnés, assure-t-elle, alors même qu'elle a été soutenue financièrement par YouTube via le concours NextUp.Le sujet est devenu suffisamment sensible pour que la Guilde des vidéastes, association professionnelle des youtubeurs fondée en juin 2019, décide de s'en saisir, notamment en appelant à témoigner tous ceux qui seraient confrontés à l'une des formes de "shadowban" – qu'elle distingue des interdictions aux moins de 18 ans pour laquelle elle demande surtout transparence et précision sur les passages en cause à YouTube. "On essaie de centraliser cette problématique pour faire un rapport statistique avec des captures d'écrans, des faits précis, et un nombre suffisant de créateurs qui ont des preuves visibles d'incompréhension de la part de la plateforme, expose auprès d'ASI son président (et coproducteur de la chaine Stupid Economics, 229 000 abonnés), Valentin Levetti. Souvent, quand on se fait shadowban, on s'en rend compte trop tard car la vidéo est déjà sortie. Certains vivent ça vraiment très mal, surtout quand ils ont travaillé longtemps sur une vidéo et en ayant pourtant respecté les recommandations de YouTube."Une opacité légalement indispensable ?Reprenant sa casquette de youtubeur spécialisé dans l'économie, Levetti passe à l'analyse du point de vue de YouTube. "Ils essaient de résoudre une équation presque impossible. Celle de rester hébergeur seulement, et de ne pas être considérée comme une plateforme qui fait du contenu éditorial, tout en satisfaisant les demandes implicites ou explicites des annonceurs, explique-t-il. Sur le principe de la publicité, YouTube n'est vraiment pas loin de la télé. Les solutions que YouTube peut avoir sont très diverses, mais ça voudrait dire dans tous les cas que la plateforme s'éditorialise." Il fait remarquer que toutes les grandes entreprises du web connaissent des problèmes similaires. Avec, en guise d'épée de Damoclès, la possibilité d'être considérées par la loi non plus comme de simples hébergeurs de contenus, sans responsabilité autre que celle du respect de la loi par les contenus qui y sont diffusés (et leur suppression à posteriori). Mais comme des éditeurs, à l'image de n'importe quel média procédant à une éditorialisation, pointait dès 2016 le chercheur en sciences de l'information Guillaume Sire, ce qui pourrait impliquer bien plus de responsabilités légales... et sociales.Des aspects qui n'ont pas échappé à Molas, lui qui avait déjà exposé, en 2020, les parallèles éditoriaux de plus en plus manifestes entre la plateforme de Google et les chaînes de télévision traditionnelles. "Le gros problème que j'ai avec YouTube est qu'ils sont censés être un hébergeur, avec certes des règles et des conditions générales d'utilisation. Mais si, systématiquement, à chaque vidéo, ils me disent ce que je peux dire ou pas, montrer ou pas, sous peine de devenir invisible sans aucun moyen d'action, c'est une forme d'éditorialisation du contenu" , fait-il remarquer à ASI. Et la plateforme devrait alors en assumer les conséquences : "S'ils se mettent à éditorialiser le contenu et à influencer mon écriture, à ce moment-là je dis OK, mais donnez-moi un contrat de travail et je travaille pour vous !" De quoi terrifier n'importe laquelle des grandes plateformes du web contemporain. De quoi, aussi, continuer à faire des youtubeurs la seule variable d'ajustement d'enjeux financiers et juridiques colossaux : l'opacité de YouTube semble avoir encore de beaux jours devant elle.Sollicitée par ASI, la plateforme YouTube n'a pas souhaité répondre aux questions posées dans le second volet de cette enquête.
Korra est très bien, mais je ne digère pas le dernier épisode et sa fin qui n'a aucun sens vis-à-vis de la série, quoiqu'en dise les gens. Il n'y a RIEN dans la série qui amène à ça.
Le problème, c'est que l'idée de condenser une saison entière de 30+ épisodes en seulement 1h30, était déjà bancale de base (t'es obligé de rajouter une voix-off qui te raconte toute l'histoire sinon les spectateurs sont aux fraises total).
Un nouveau Club JDG est sorti !Meilleure conclusion.
Ah oui, probable (je n'ai pas vérifié hier). Dans tous les cas, ça ne rentrait pas dans 1h30 de film. A mon humble avis, on lui a commandé de faire ce film et lui, il a fait le minimum syndical avant d'empocher le chèque. Parce que là, certes, les effets spéciaux sont beaux, mais l'univers est clairement traité par-dessus la jambe. Mais bon, on s'éloigne du sujet.
Je te conseille la vidéo de Durendal sur le film pour voir que c'est pas le cas et aussi qu'un paquet des critiques sur le film sont bidons ou viennent de fans ( moi j'ai vu à l'époque le film avec pas mal de gens ne connaissant pas la série et ils l'ont tous aimés)
Explications très intéressantes sur la façon dont youtube gère la musique sur les vidéos. Tain, douze sociétés qui réclament le pognon pour une musique utilisée dans une seule et même vidéo...
Pour info (parce que tu sembles avoir zappé ce détail), j'ai vu la série et, ensuite, j'ai vu le film. Donc je n'ai absolument pas besoin de regarder des vidéos ou de lire des critiques d'autres personnes pour me faire mon propre avis. Qui est, en l'occurrence, que le film est moisi. Voilà. Fin du HS.
D'ailleurs Shyamalan ne visait pas les fans avec le film, le film était sensé faire découvrir Avatar au plus grand nombre
Bah après, si ton adaptation déçoit tous les fans, c'est que y'a une couille dans le potage...