Ah ouais quand même...
Les protagonistes sont connus. D'un côté figure une école de pensée fortement marquée par les luttes de décolonisation, à l'université Paris-VII, portée par Mme Coquery-Vidrovitch, pour laquelle « la guerre d'Algérie a été le déclic » . Cette approche, un temps « marxisante », a été défendue par une génération de coopérants nourrie à l'idéologie de Mai 68. Une génération qui, à l'époque de François Mitterrand, s'efforça de faire passer ses idées par l'entremise de Guy Penne, son conseiller pour les affaires africaines. « Je faisais de l'histoire engagée et utile » , assume la chercheure.Le camp opposé a pour fief l'université Paris-I (la Sorbonne), où l'on moque volontiers le « tiers-mondisme » de l'adversaire. Les disciples et héritiers du professeur Yves Person (1925-1982), de l'historien et archéologue Raymond Mauny (1912-1994) et du médiéviste Jean Boulègue (1936-2011), spécialiste des royaumes ouest-africains, revendiquent une rigueur méthodologique et une approche plus scientifiques. « Avec une volonté d'imposer la légitimité de l'histoire de l'Afrique comme une discipline rigoureuse », insiste Bertrand Hirsch, spécialiste de l'Ethiopie médiévale. M. Fauvelle, l'élu du Collège de France, vient de cette « école » Paris-I. [...] Les tensions s'exacerbent lorsque Pierre Boilley, pur produit de Paris-VII, gravit les marches du pouvoir à Paris-I où il prend, en 2006, la tête du Centre d'études des mondes africains, avant de diriger, huit ans plus tard, un méga-laboratoire du CNRS, l'Institut des mondes africains. Durant toutes ces années, chaque camp manipule les structures, les labos et leurs thésards. Le centre de gravité du conflit se trouve ainsi déplacé à la Sorbonne. Toute une génération de jeunes chercheurs pâtira de ces intrigues d'arrière-garde entre mandarins.« Mieux vaut nommer personne que M. Fauvelle » : c'est, en substance, le message envoyé par Jean-Pierre Chrétien aux professeurs du Collège qui l'ont consulté, comme le rapporte l'un d'eux au Monde . Sollicité pour donner son avis, M. Chrétien, âgé de 81 ans, a tenté de suggérer une « chaire tournante » et s'en explique : « Je me suis dit que personne n'avait vraiment le profil, qu'il n'y avait pas un Boucheron sur l'histoire de l'Afrique. » [...]Après avoir transmis ses Titres et Travaux , M. Fauvelle s'entretient, en mai et juin, avec chacun des professeurs du Collège. Des rencontres parfois tendues. « J'ai deux problèmes avec vous : vous n'êtes pas noir et vous n'êtes pas une femme », attaque tout de go une professeure. Un autre va jusqu'à lâcher : « L'histoire du Mali au Collège de France, il ne manquait plus que ça ! »
Jaune : couleur du briseur de grève.
Idem. Et histoire d'en apprendre un peu plus, d'où tiens-tu cette information, Ara ?
Le jaune a été valorisé dans l'Antiquité grecque et romaine et pour les peuples de la Bible avant d'être l'objet d'une véritable désaffection au Moyen Âge.[...]Pourquoi ce tournant, au Moyen Âge?Dans l'imagerie médiévale, à partir du XIIe siècle et au moins jusqu'au XVIIe siècle, le jaune est la couleur des félons. Judas, qui apparaît comme le traître par excellence - celui qui a trahi le Christ -, est représenté avec ce qui apparaît comme des attributs infamants: des cheveux roux et une robe jaune. Cette idée de traîtrise colle à la couleur jaune. Et elle marche dans les deux sens. Le jaune est ainsi la couleur des trompeurs mais aussi celle des trompés. Le mari trompé, le «cocu», est affublé de vêtements jaunes, tout comme les syndicats traîtres qui font semblant de défendre les ouvriers mais roulent en fait pour le patronat sont désignés comme des «jaunes».Mais pourquoi ce choix du jaune plutôt que d'une autre couleur?Ce lien avec l'idée de tromperie est peut-être également lié à des problèmes de teinture ou de peinture. Le jaune est une couleur qui semble belle et ne tient pas. Elle tourne, triche et trompe. Sur le moment, lorsque le tissu sort de la cuve, avec des teintures ordinaires à base de gaude (réséda) ou de genêt (le safran était un colorant de luxe), le jaune est beau, lumineux puis, au bout d'un certain temps, il devient triste, terne, grisé. Il y a peut-être aussi cette idée-là: c'est une couleur qui trompe ; on croit qu'elle est belle et elle ne l'est pas. [...]Étymologiquement, le mot «jaune» vient d'où?Du latin galbinus , mot d'origine germanique: gelb en allemand, yellow en anglais viennent de la même famille. Si on remonte du côté des langues indo-européennes, on a l'idée de lumière, de briller. Mais quand le mot arrive, assez tard, dans le vocabulaire latin, il qualifie plutôt les vilains jaunes. Galbinus , c'est un jaune désagréable, acide, un jaune citron. Curieusement, ce mot a éliminé les autres mots et a donné peu, après l'an mil, le «jaune».
Le jaune était extrêmement positif pendant l’Antiquité, grecque et romaine, et pour les peuples de la Bible. C’était une couleur valorisée, signe de chaleur, de lumière, de joie. C’est au Moyen Age central qu’il commence à se dévaloriser, pour des raisons du reste pas très nettes. En gros, l’or prend sur lui tous les bons aspects de la couleur et ne laisse au jaune stricto sensu que les mauvais. A partir du XIIe siècle, l’or devient peu à peu le bon jaune, signe de richesse, de beauté, de prospérité. Il est associé au culte divin et renvoie au sacré. Il ne reste au jaune ordinaire que les aspects négatifs : mensonge, hypocrisie, trahison. On pourrait dire que le responsable du «mauvais» jaune, c’est l’or. Cette symbolique négative du jaune traverse les siècles et perdure jusqu’à nos jours. Aujourd’hui, comme aux XVIIe ou XIXe siècles, le jaune incarne le mensonge et la tromperie. Au reste, il s’agit aussi bien des trompeurs (des «casseurs de grève», par exemple) que des trompés (les maris cocus au théâtre).