HistoireTout petit, je faisais des rimes que je scandais et qui s’évanouissaient vite. Pendant le premier confinement, je me suis lancé le défi d’écrire des petits textes et de les garder. Le but est de mettre des mots à mes émotions. J’en ai parlé à des amis et ils ont aimé ma démarche. Je leur ai lu certains de mes travaux. Ils en ont trouvé des qualités et des défauts.
Ils m’ont dit « pourquoi ne pas les publier quelque part pour voir ce que les gens en pensent ? ». Voilà, je franchis le Rubicon et je crée ce topic sur SSP.
Je précise que je fais cela sans prétention et ce qui compte est que je prenne du plaisir en écrivant mes textes. Si on me dit que c’est nul, je survivrai.
Bon, je pleurais quand même un coup. StyleMes textes vont de la prose à ce qui ressemble à de la poésie.
En effet, je n’ai pas la prétention de dire que mes créations sont de véritables poésies. La prose sonne sans doute moins bien à l’oreille que la poésie mais celle-ci est plus contraignante dans le sens où il faut être à la recherche de la rime qui fait mouche et du rythme. J’ai abandonné l’idée de versifier. J’ai tenté de faire des alexandrins, mais no way. La prose est plus malléable.
J’ai lu pas mal de poésies et j’ai conscience que certaines de mes créations ont pu être influencées involontairement par ces lectures. Je cherche aussi à faire des rimes originales (pas du genre « bonheur » avec « cœur » ou « amour » avec « toujours ») mais pas toujours facile.
On m’a dit que j’avais le « gnangnan style »
: sentimental, fleur bleue, beaucoup de références à la pluie, à la mer, à l’eau … Ai-je été traumatisé étant petit par les ondes bleues ?
Quand je me relis, j’en ai conscience, mais je suis ainsi.
ÉlaborationElle se déroule en quatre phases :
Phase 1 – L’idée :
J’ai des idées ou des sentiments de base et je prends un papier. Je commence à écrire ce que je ressens. Dans cette phase, il y a des mots clés ou des rimes qui me viennent spontanément. Cette phase est plutôt rapide, deux heures maximum.
Phase 2 – Je creuse :
Je divise mon texte en plusieurs morceaux et je travaille sur chacun d’eux séparément. Là, je réfléchis davantage aux rimes, aux jeux de mots ou à la longueur du paragraphe. Cela peut me prendre 2-3 jours et je fais toujours cela sur papier.
Phase 3 – l’uniformisation :
Je me retrouve avec des morceaux de texte que je rassemble. Là, je vois qu’ils ne peuvent pas bien aller ensemble. Pour idée, je sors de chez moi avec des chaussures rouges, un pantalon vert, un chapeau jaune et une chemise bleue. Je les aime séparément mais le tout ne se marie pas bien.
Là, je délaisse le papier et je travaille sur ordinateur ou sur mon téléphone.
Pour uniformiser le tout, je fais attention aux temps, aux adverbes pour lier le texte, je regarde s’il n’y a pas de redondance, etc. Je relis à voix haute mes textes jusqu’à l’écœurement pour m’en imprégner et analyser le rythme global. Cette phase peut durer une semaine.
Phase 4 – Le peaufinage :
Je travaille encore sur ordinateur, j’essaie de prendre du recul et je laisse « reposer » mon texte quelques jours.
Puis, je le lis à des proches et ceux-ci me disent honnêtement ce qu’ils en pensent. Je fais soit des modifications subtiles, soit, tout simplement, je recommence tout.
Il m’est arrivé pour un de mes textes « Maîtresse » de recommencer quatre fois car aucune version ne me convenait à 100 %.
Je cherche aussi la concision. Je n’écris pas des mots juste pour écrire des mots. Je regarde aussi l’aspect visuel du texte si, à l’œil, il me plaît. Une fois qu'il me convient parfaitement, je suis enfin apaisé.
Cette phase est élastique, elle peut durer une semaine ou même un mois.
Here I goPour l’instant, j’ai fait cinq textes (deux sont personnels, dans le sens où je les ai faits pour moi-même), ce sont « le ciel bleu » et « la voile solitaire ». Les trois autres ont été composés en l’honneur de proches. Ce sont « Maîtresse », « Le phare » et « Millésime ».
Le ciel bleuIl pleut sur la ville.
Les nuages menacent, acheminant leurs couleurs d'orage à travers la cité immobile.
Il pleut sur la route.
Les passants déambulent, se remémorant les souvenirs qui envoûtent.
Il pleut sur le visage.
Les larmes tombent, affadissant de leur rideau terne le paysage.
Il pleut sur le cœur.
Les soupirs perlent, distillant leur mélancolie sur d'anciennes douleurs.
Le soleil apparaît.
Il ne pleut plus.
Déchirant la noirceur, l'astre du jour dissipe la fatalité.
Irradiant de chaleur, le doux foyer ranime la vitalité.
Les habitants régénérés redeviennent heureux.
Rassérénés à la vue du ciel bleu.
La voile solitaireUne voile solitaire voguait sur l’océan, à la recherche de l’être aimé, à moins, que tout simplement, elle ne le fuyait.
J’émergeais de mes songes lorsque je t’aperçus échouée dans le lointain, baignée par le crépuscule de cette journée déclinante.
Le vent me poussa dans ta direction.
Je te frôlai … je t’accostai … je t’abordai.
Sans mot dire, je plaçai mes mains langoureusement dans les tiennes.
Plongeant dans ton regard, je me noyais dans le bleu de tes yeux.
La musique des battements de mon cœur se confondait avec celle, monocorde, du tapotement maternel de la pluie fine qui, seule, nous accompagnait.
Mes lèvres, crispées et asséchées par l’émotion qui m’étreignait, peinaient à s’ouvrir.
Ma bouche délivra enfin le message libérateur :
« Je t’aime ! ».
Je pris peur, effrayé par l’audace de mes paroles, te laissant interdite, sous le choc du poids de mes mots.
Je m’éclipsai, naviguant vers l’aube naissante du jour qui s’annonçait, plus esseulé que je ne l’étais.
Voile solitaire je resterai.
Millésime
Du millésime qui s’achève, où s’entremêlent les saveurs, nous en distinguons ces couleurs.
Le blanc qui accompagna nos nuits sans sommeil.
Le noir que nous broyions au réveil.
Le rouge qui mit nos cœurs à nu.
Le bleu qui teinta nos larmes retenues.
Le vert qui garda en lui nos espoirs.
Le gris qui assombrit notre ciel sans histoire.
Le jaune qui éclaira de sa lumière notre voûte.
Le rose de cet ange qui égaya notre route.
Mon enfant,
Le millésime qui s’annonce, dont tu nous offres la primeur, nous le dégustons en ton honneur.
Le phare
Maman,
Je vois au loin, perché sur la colline, ce phare majestueux qui domine le paysage.
Sa hauteur imposante lui permet de côtoyer les étoiles et de tutoyer les anges.
Fidèle au poste, ce gardien vigilant accomplit sans faiblir son labeur quotidien.
De sa lumière, il guide les personnes perdues dans l’obscurité.
De sa chaleur, il soulage les âmes et réconforte les peines.
Inlassablement, la mer démontée déchaîne son courroux.
Le phare assiégé demeure inaltérable, inébranlable, indéracinable, indéboulonnable.
Il échappe, comme par magie, aux ravages du temps.
Ayant surmonté bien des épreuves, il reste une solide colonne sur laquelle nous nous appuyons.
MaîtresseMaîtresse rime avec gentillesse.
Joie de vivre faisant éclore nos sourires, qu’il ne tient qu’à elle de cueillir.
Maîtresse rime avec tendresse.
Ange paré des plus beaux atours qui, de ses ailes, nous couvre d'amour.
Maîtresse rime avec sagesse.
Source intarissable de science qui étanche notre soif de connaissance.
Maîtresse
Maîtresse
Maîtresse
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Ces mots, en leur farandole, s'accolent, s'accumulent, se bousculent et s'entrechoquent quand on les invoque.
Nos mots, fauchés en plein vol, se frôlent, basculent, reculent et se bloquent quand on vous évoque.
Maîtresse,
Nous louons votre présence chaleureuse qui dissipa à jamais notre doute.
Maîtresse,
Nous remercions la chance fabuleuse qui nous permit de croiser votre route.