Disclaimer : Les personnages et l'univers de Saint Seiya appartiennent à Masami Kurumada.
Murmures d'or
La place des civils
L'une après l'autre, les armures acquiescèrent. Jusqu'au Cancer qui conclut :
— Ouais, faut avouer qu'ils sont utiles, à leur manière.
— Ah ça, on peut dire que Shunrei a été très utile... pour aider Shiryu à te battre, déclara le Bélier.
Le Cancer faillit s'étrangler :
— Cette gosse ? Pff, vous n'avez pas vu comme je, on, l'a flanquée dans la flotte ? Un moucheron, voilà ce qu'elle était celle-là.
— Un moucheron qui t'a quand même perturbé avec ses prières, insista le premier signe du Zodiaque.
— Mais pas du tout ! riposta le quatrième. Bon, peut-être que DM a un petit peu paniqué...
— Un petit peu ? Il était vert ! Vert de... de peur si je me souviens bien !
— Oh alors là faut pas exagérer non plus ! Disons qu'il a ressenti une petite gêne. Ça ne t'énerverait pas, toi, si un fichu moustique te tournait autour ?
— Un moustique qui parvient à tourmenter un Saint d'Or, c'est, comment dire... intervint le Taureau.
— Oui bon, vous avez compris l'idée.
— Moi, ce que j'ai compris, c'est qu'une petite gamine a suffisamment gêné DM pour qu'il essaie de s'en débarrasser, persista le Bélier. Pouvait pas bloquer ses prières ou un truc comme ça ? S'il était capable de la balancer dans l'eau à je ne sais combien de kilomètres de distance...
— Justement, il voulait lui donner une leçon. Et puis ça montre bien son côté cruel et impitoyable.
— Ouais c'était un salaud, quoi.
— Vaut mieux ça qu'un planqué !
— N'empêche, le terrifiant DM qui ne supporte pas des prières... se moqua le Bélier.
— Mais tu les aurais entendues, ces prières ! Oh mon Dieu, protégez Shiryu... Et nanani et nanana... Ton porteur aussi il aurait craqué !
— Tss, ça risque pas, Mû était le calme incarné, rien n'aurait pu le faire sortir de ses gonds. Enfin, je veux dire, pas une broutille comme ça en tout cas.
Le Cancer tenta des comparaisons pour bien faire entrer l'idée dans la tête de ce Mouton d'Or :
— Bon, t'as déjà entendu un clou rouillé qui crisse sur un tableau noir ? Une fraise de dentiste ? Oui ? Alors tu as une idée de ce que c'était.
— Ben non, justement. Je ne suis jamais allé à l'école, quant au dentiste, tout le monde sait bien que les Chevaliers d'Or pourraient tourner dans une pub pour Colgate extra blancheur...
Le Cancer bondit sur le Bélier :
— Mais c'est pas vrai !
— Hop ! fit la Balance en faisant tourner le premier signe derrière lui pour le protéger.
— Les enfants, dit-il, vos gamineries, c'est bien gentil, mais on ne peut pas nier que les civils aient une utilité. Cessons de parler de Shunrei et de sa capacité à troubler un Gold.
— Oui, il n'y a pas qu'elle, c'est vrai, acquiesça le Taureau. Personnellement, s'il y en a un qui m'a fait frissonner, c'était bien Cassios.
— Ah, Cassios ! approuva la Balance. Excellent choix mon ami. Voilà une âme de Chevalier, une vraie !
— Qu'est-ce que tu insinues par là ? fit le Cancer, tout en connaissant la réponse.
— Que ton DM, c'était quand même la honte de la Chevalerie, asséna le Scorpion.
— Moi s'il m'a fait honte, c'est uniquement quand il a craqué devant les simagrées de cette fille !
— Ah ah ! triompha le Bélier en pointant son sabot sur le Crabe. Je le savais, je le savais ! Alors, tu avoues ?
— Avouer quoi ? Je l'ai déjà dit, cette fille, c'était une envie de te démanger alors que tu pouvais pas le faire, genre t'as le cul qui te gratte et tu es entouré de monde. Ça c'est bien embêtant. Ben Shunrei, c'était pareil.
— Rhooo, surveille ton langage ! le reprit la Balance.
— Désolé, s'il faut en arriver aux comparaisons sales pour vous faire entendre raison... Ben en tout cas, DM, lui, il se serait gratté, point barre. Donc, la fille, direct dans la flotte.
— Décidément, plus j'en entends, et plus je me réjouis de ne pas l'avoir eu comme porteur.
— Ah ça c'est sûr, Virgo ! Toi tu n'aurais pas tenu dix secondes avec lui ! Lui c'était un mec, un vrai. Pas un chevelu adepte du yoga !
— Un homme n'a pas besoin d'être sale pour être vrai ! le contredit le Poisson.
— Pff, tout le monde sait qu'Aphrodite était un... heu... type à part. Puis bon, c'était un exemple, hein ! Disons que DM n'était pas du genre à faire attention à son brushing, mais ce n'était pas un crado non plus. C'était pour que vous vous rendiez compte.
— Aaah tu me rassures, soupira la Vierge.
La Balance recadra la conversation :
— Bon, et ce Cassios alors ?
— Personnellement je l'adore, admit le Taureau. Enfin, je l'adorais. C'était le prototype du mec qui n'a l'air de rien, qui semble rustre, mais au fond de lui se cache un cœur gros comme ça. Honnêtement, son sacrifice a fait pleurer mes yeux.
— Tu m'étonnes ! Tu es tout pareil, sous tous ces muscles se cache aussi un cœur d'artichaut.
— C'est vrai, Cancer. Mon porteur était un mélange de force tranquille et de sagesse.
— Ce n'est pas ce que je...
"… voulais dire" voulut signifier le Cancer, mais il renonça. Il commençait à en avoir un peu assez de devoir batailler pour imposer ses idées. Que les autres mijotent dans leur jus d'erreur, après tout ! Il n'était pas un instituteur chargé de faire comprendre leurs leçons à ses élèves !
— Moi aussi Cassios m'a ému ! Tenez, je suis sûr qu'il aurait résisté à pas mal de piqûres de la Scarlett Needle ! avança le Scorpion.
— Alors soit Cassios était devenu, on ne sait comment, extrêmement fort, ou bien la Scarlett Needle n'est plus ce qu'elle était... insinua le Cancer.
Le Lion fit claquer sa langue :
— Je t'arrête tout de suite, Cancer. Tu n'étais pas là, tu n'as pas vu cette lueur dans ses yeux, les yeux de quelqu'un de déterminé, qui sait qu'il va mourir et qui, pourtant, persiste et signe. À moi aussi il m'a fait forte impression.
— J'aurais aimé que Camus ait un élève de cette trempe, ajouta le Verseau. Quoi que non. S'il était capable de tomber amoureux de son maître, qui sait ce qui se serait passé entre lui et mon porteur ? Déjà que celui-ci a dû combattre le Complexe d'œdipe de son disciple préféré...
— Cassios ne pouvait pas devenir un Chevalier du froid, son cœur était trop chaud !
La plupart des autres armures approuvèrent les propos du Capricorne. Puis le Sagittaire prit la parole :
— En parlant d'amour, j'en connais une qui s'est morfondue longtemps. Et c'est pas fini...
Devant la mine interrogatrice de ses pairs, il précisa :
— Mais si, vous savez bien ! La petite là, heu... rhaaa, comment elle s'appelle déjà ?
— Tu peux détailler ? demanda la Balance, sincèrement intéressée.
— Ben, la gamine qui courait après Seiya. Ils ont grandi ensemble à l'orphelinat.
— Seika ?
— Non, Seika c'est sa sœur. Je te parle de l'autre fille, celle qui s'occupe des mômes maintenant. Ah c'est pas vrai, j'avais son prénom sur le bout de la langue !
Un ange passa, pendant lequel les protections sacrées furent toutes occupées à chercher ce fameux nom. Soudain, le Sagittaire se frappa le front.
— Miho ! Voilà c'est comme ça qu'elle s'appelle !
Ce fut un concert de haaaa ! comme si le neuvième signe du Zodiaque avait trouvé la solution à une énigme insoluble.
— Jamais entendu parler, avoua le Cancer. Et vous ?
— Moui, vaguement, répondit le Scorpion. Attends Sagittarius, tu veux dire... Parce qu'on est bien d'accord, elle a l'âge de Seiya , hein ? Tu veux dire qu'ils ont laissé une enfant de treize ans gérer un orphelinat ? Je suis sûr que certains des pensionnaires étaient plus âgés qu'elle !
— Si on va par là regarde Saori, elle avait treize ans aussi.
— Et elle, elle devait commander une armée.
— Bon ça suffit Cancer, tu es pénible avec tes réflexions à deux drachmes ! explosa tout à coup la Balance.
— Que, hein, quoi ? Mais j'ai rien dit, je voulais juste faire une comparaison avec Saori !
— Tu veux dire que ce n'était pas moqueur ?
— Non. Parole.
— Ah tiens, pour une fois... Bon d'accord, excuse-moi d'avoir crié. Tellement l'habitude que tu... enfin bref. Pour en revenir à Miho, on a des Chevaliers de treize ans, une déesse de treize ans, pourquoi pas une directrice d'orphelinat de treize ans aussi ?
— Moi ces âges, je m'y ferai jamais.
— Pareil que toi, Capricornus, approuva le Verseau. Déjà Saori, vous avez vu ses formes ? On dirait une femme faite. Quand on m'a dit l'âge qu'elle avait, je n'y croyais pas. Et pour les autres c'est pareil. S'ils sont formés comme ça physiquement, qu'est-ce que ça donnera dans dix ans !
— Simple. Dans dix ans, ils auront l'air d'avoir fait la guerre de 14.
— Des sortes de poilus, tu veux dire, Scorpius ?
— Oui enfin, s'ils survivent jusque là.
— Mais non ! le contredit le Lion. Tu oublies le Cosmos ! Avec lui, on peut accomplir des miracles, alors pourquoi pas une croissance accélérée. Mais attention, hein ! Juste ce qu'il faut pour ne pas avoir l'air de mioches en culottes courtes, et pour ne pas non plus ressembler à des vieillards ayant fait la guerre des tranchées. Le cosmos ! C'est magique, je vous dis !
— Pas faux... Donc Miho se morfondait après Seiya, la pauvre, reprit le Sagittaire. Parce que lui, évidemment, il n'en avait que pour Saori. Quand je pense qu'elle voulait le transformer en cheval quand ils étaient petits !
— Surtout ne dis rien, surtout ne dis rien, surtout...
— Pourquoi tu murmures ça, Cancer ? voulut savoir le Poisson. Qu'est ce que Sagittarius ne doit pas dire ?
— Non non, c'est moi, je me parle tout seul, il y a une image qui m'est venue et même moi je trouve ça déplacé...
— Dans ce cas, tu as raison, ne dis rien, ordonna la Balance.
— Pour en revenir à Miho, elle est un peu comme Shunrei, en moins chanceuse.
— Et en moins chiante aussi ! Comme si elle pouvait pas attendre son prince, enfin, son Chevalier, servant, comme elle, en restant bien gentiment dans son coin !
— La pauvre petite en tout cas, ça me fait de la peine, dit le Poisson. Attendre en vain. Parce que, c'est sûr, il ne va pas la lâcher Saori, le Seiya. Une déesse, vous parlez d'une prise !
— Moi j'aimerais bien qu'ils arrêtent de se tourner autour ces deux-là et qu'ils passent à la vitesse supérieure.
— Oh doucement Scorpius ! s'écria la Balance. On parle de jeunes de treize ans là !
— Donc ils sont assez âgés pour aller se faire tuer, mais pas assez pour... Mais de toute façon s'ils pouvaient au moins se déclarer...
— Ça se fera pas. Déesse, Chevalier... Aucune chance, ils sont trop dans le trip amour courtois. Et puis il y a les guerres, ils n'ont pas le temps pour ça.
Devant l'assertion du Cancer, ce fut un concert de « Ah oui », et de « C'est vrai». Et le Crabe Doré se regorgea : enfin on approuvait une de ses idées !
— Dites, on parlait de Miho tout à l'heure, rappela le Poisson. Elle attendait après Seiya ? Ben qu'elle fasse la queue comme les autres parce qu'il y avait aussi Seika qui était sur la liste.
— Alors, de une c'était sa sœur, de deux elle avait perdu la mémoire, donc le Seiya, elle ne savait même pas qu'il existait...
Face à la déclaration du Scorpion, le Poisson rectifia :
— D'accord, disons que dans ce cas, c'est Seiya qui s'est morfondu après sa sœur.
— Faudrait savoir, c'est Saori qu'il veut ou Seika ? demanda le Gémeau que l'on n'avait pas encore entendu.
— Ah mais tu penses bien que, comme héros, monsieur a besoin de les avoir toutes à ses pieds... répliqua le Scorpion.
— Personnellement je pense que ce n'est pas tant Saori que Seiya aime, mais plutôt la déesse. Seiya avait du mal à supporter cette petite pimbêche de son enfance, mais le Chevalier Pégase, lui, il soupire après la Déesse Athéna, expliqua la Vierge Je crois que entre Seiya et Saori il n'y a que de l'amitié, là où, pour Pégase et Athéna, il y a de l'amour. Courtois certes, mais bien là.
" Pour en revenir à Seika, elle a été un moteur pour Seiya, c'est pour elle qu'il s'est inscrit aux Galaxian Wars. C'est d'abord pour la retrouver qu'il s'est plongé dans cette aventure. Mais ensuite, il y a eu Athéna et les batailles en son nom. Et Pégase a trouvé un autre moteur. Ou, si vous voulez, un moteur supplémentaire.
— Se battre pour une fille, voire deux... Pas ma tasse de thé, je préfère obéir à mon supérieur , si possible un mec badass, qui envoie du lourd, histoire que je n'ai pas honte à me ranger de son côté.
— Ah ah ah, va dire ça à ton DM ! s'esclaffa le Bélier.
Puis, prenant une voix transie d'amour :
— Oh Elena, non ne meurs pas ! Noooon !
— Cette fois je vais le tuer !
Et le Cancer de bondir sur le Bélier, lequel se réfugia derrière les autres armures.
— Ah mais laissez le moi ! tempêta le Crabe.
— Quand tu seras calmé.
— Mais Libra, tu vois bien qu'il n'arrête pas de me chercher ! J'avais parlé de clou sur un tableau noir, Aries est exactement comme ça aujourd'hui ! Et bien je vais vous dire une chose, j'ai aimé quand Mû s'est pris une raclée par DM, avant que le canasson arrive à la rescousse, au début de la guerre contre Hadès. Quand j'y repense, je jubile ! Parfaitement ! Ah !
— Ah bravo, tu jubiles de voir deux compagnons d'armes s’entre déchirer, nota le Taureau. Belle mentalité...
— C'est ce qu'on appelle la sélection naturelle, seul le plus fort survit.
— Heu... rappelle-moi juste qui a été renvoyé au château d'Hadès par Mû, justement ?
— Ça ne compte pas, Mû voulait juste se débarrasser de DM et d'Aphrodite, c'était pas un coup mortel !
— Arrête Cancer, tu t'enfonces, glissa le Poisson à son oreille.
Le Taureau se racla la gorge :
— Et donc, ces civils, utiles ou inutiles ?
— Vu que la plupart on ne les voit pas, je dirai que je m'en fiche.
— Alors moi, je ne les aime pas du tout.
— Les autres, vous partagez les avis de Scorpius et de Cancer ? interrogea le Taureau.
On lui répondit : « bah heu, non », « je ne sais pas trop », « oh moi les civils vous savez... ».
— Je dirai que ce sont des éléments du décors, voilà, conclut la Vierge.
Tout à coup, la sixième armure ouvrit grands les yeux et poursuivit avec emphase :
— Mais les fans, les fans ! Alors là en tant que civils, se sont quand même la crème de la crème, le nec plus ultra ! J'adore les fans !
— Peuh, évidemment il n'y en a que pour toi, Aries et Gémini... Ah j'oubliais Léo, tiens.
— Tu n'as pas tort, Aquarius, acquiesça le Taureau. Faudrait peut-être convaincre nos porteurs de faire plus de coups d'éclat, histoire d'impressionner les foules.
— Que chacun fasse son numéro comme au cirque, tu veux dire ? Très peu pour moi...
— D'accord avec toi, Scorpius, l'humiliation ne passera pas par moi ! assura le Cancer.
— Heu... commença le Bélier.
Nous n'en saurons pas plus, mais la lueur qui brille soudain dans les yeux du Crabe d'Or ne laisse rien présager de bon...