Les Verts ne veulent pas stigmatiser les agriculteurs précisant qu’avec la fermeture des déchèteries, les brûlages de déchets verts par les particuliers, pourtant interdits, ont aussi favorisé la présence de particules fines. « On ne demande pas aux agriculteurs de renoncer à tous les épandages mais au moins de les reporter ou de les diminuer », ajoute Julie Nicolas qui regrette l’absence de réponse de la préfecture. « A Lille, comme partout en France, il y a un refus des préfets de réglementer les épandages, mais si on découvre que les pics de pollution peuvent être corrélés avec les hospitalisations en cette période de Covid, c’est potentiellement une petite bombe », estime Julie Nicolas. Les écologistes soulignent le lien étroit entre la pollution de l’air par les particules et le développement, ainsi que l’aggravation de maladies respiratoires, notamment du Covid-19. Or, une ordonnance rendue le 20 avril par le Conseil d’Etat rappelle que l’administration doit faire preuve, dans le contexte actuel d’urgence sanitaire, d’une vigilance particulière en prenant des mesures pour limiter les pratiques agricoles polluantes.Président de la Chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais, Christian Durlin rappelle, de son côté, les contraintes liées à son métier : « Techniquement, les épandages se font à un moment où la plante a besoin de fertilisants, en début de croissance, donc on ne choisit pas les périodes ! » Installé depuis 1992 sur une exploitation de polyculture-élevage à Richebourg, dans le Pas-de-Calais, Christian Durlin avoue une certaine lassitude face aux critiques visant sa profession. « On ne peut pas réclamer une autonomie alimentaire de proximité et critiquer son fonctionnement. Si on ne veut pas de ces émissions, il ne faut pas d’agriculture ! » Christian Durlin aimerait également connaître dans le détail la composition et la provenance des particules polluantes dans l’air. Chez ATMO Hauts-de-France, on précise, en effet, que le nitrate d’ammonium a une durée de vie plusieurs jours. « Notre région a pu récupérer des masses d’air déjà chargées par les vents de nord et nord-est. » En clair, une partie de la pollution peut aussi venir des pays voisins comme la Belgique et les Pays-Bas.
Surtout, ce drame est tout à fait annonciateur d’autres à venir car, bien que spectaculaire et médiatisé, il n’a en fait rien d’un événement exceptionnel. Comme le déclarait Sergueï Donskoï, alors ministre fédéral des Ressources naturelles et de l’Environnement, en 2016 : environ 60 % des pipelines du pays sont en mauvais état et, en rythme annuel, les fuites d’hydrocarbures sont de l’ordre de 1,5 million de tonnes. Dit autrement : chaque année, la Russie laisse échapper dans la nature 75 fois plus d’hydrocarbures que lors du seul drame de Norilsk, sans déclencher l’intérêt des médias ni la mobilisation de personnalités politiques se déclarant pourtant écologistes et intéressées par le sort de l’Arctique.